Article Antoine Libé – Dec 2011

Je m’appelle Antoine, et, en 1966, je réclamais, dans une chanson, « la pilule en vente dans les Monoprix ». Aujourd’hui, plus de 90 % des femmes françaises utilisent une contraception efficace.

Pour la première fois depuis près d’un demi-siècle je ressens le besoin de m’exprimer, pour m’opposer au texte de loi « abolitionniste »proposé à l’assemblée, résolution qui préconise une solution drastique, peu applicable, digne de la prohibition américaine des années 1920, et qui, à l’image de cette triste période de l’histoire des libertés, rejettera les travailleurs et travailleuses du sexe dans la précarité, et la vulnérabilité, n’apportera aucune amélioration au sort des personnes exploitées, et beaucoup de malheur en général.
Malheureusement le rapport effleure à peine, ou ignore complètement la solution tout à fait différente choisie par des pays démocratiques comme la Suisse, l’Allemagne, l’Australie, ou comme la Nouvelle-Zélande, un des pays les moins corrompus de la planète.

En Nouvelle Zélande, la décriminalisation fonctionne

Les personnes qui ont choisi de travailler dans les métiers du sexe y sont depuis près de dix ans entièrement décriminalisées, peuvent s’associer ou être employées, dans des conditions saines et sécurisées pour elles comme pour leurs clients. Ce qui diminue grandement tout problème sur la voie publique.
90 % des personnes ayant choisi ces métiers travaillent indépendamment, dans des établissements déclarés, où elles sont protégées, contrôlées, mais entièrement libres de leur choix : aucun rapport avec les maisons closes d’autrefois, qui les enfermaient. Et, bien sûr, les clients ne sont pas pénalisés, à moins qu’ils ne s’adressent sciemment à des personnes victimes de traite.
Le ministère de la justice néo-zélandais a conduit, cinq ans après la décriminalisation, une étude qui a conclu a l’absence de lien avec le crime, à une quasi absence de coercition, moins de 5% des personnelles exerçant ces métiers mentionnant une contrainte.
La législation néo-zélandaise, très respectée, a même pu constater que, contrairement à ce que clament les zélateurs de la prohibition, aucune augmentation notable du nombre des «sex workers» (travailleurs et travailleuses du sexe) n’a eu lieu ni en temps normal, ni à l’occasion de la récente Coupe du Monde de Rugby.

Le modèle suédois est un leurre

La commission se réfère fréquemment au prétendu succès du modèle suédois, omettant de dire que ce pays est devenu un des pays de la planète qui souffrent du plus grand nombre de viols : ils ont doublé depuis l’année 2000. La prostitution en Suède n’a fait que se déplacer sur Internet ou dans la plus grande clandestinité.
Je connais pour ma part à l’étranger comme en France, un bon nombre de personnes qui travaillent dans le domaine du sexe et qui le font de leur plein gré, sans jamais avoir été ni violentées, ni menacées. Il est temps de leur permettre d’accéder à un cadre sûr et respectable où elles pourront exercer sans ostracisme leur activité, qui a, je l’affirme, une notable importance sociale. Il est temps aussi d’aider celles qui sont dans la détresse, mais certainement pas en les rejetant plus encore dans l’illégalité.
Une solution comparable à celle de la Suisse et de la Nouvelle-Zélande, de l’Allemagne, de la Hollande et de l’Espagne, accompagnée bien évidemment d’une active répression des réseaux de traite, et d’une éducation des personnes ayant recours aux travailleurs et travailleuses du sexe, les incitant au respect, serait beaucoup plus à l’image d’un pays démocratique et libre comme la France. Où, depuis cinquante ans, il est clairement établi que les relations entre des personnes adultes et entièrement consentantes ne concernent personne d’autre qu’elles.
Oh Yeah !

Commentaires fermés.